Mise à jour : 04-Mar-2008
24 ans
24 ans Ma famille est installée dans cette ville depuis plusieurs générations. Mon père tenait la plus grande librairie d'Olsztyn, et avec ma mère, ils organisaient tous les étés des rendez-vous littéraires comme ils les appelaient. Beaucoup de monde y participait, c'était une sorte de témoignage pour mes parents, de gratitude envers tous nos voisins et clients. Je finissais mes études de médecine à la faculté de Varsovie quand la guerre à éclaté. Par prudence, tout juste avant que le pays ne soit envahi, mes parents et d'autres personnes de ma famille ont immigrés aux États-Unis d'Amérique. Seules mes tantes et une cousine n'ont pas voulu quitter le pays, cela fait longtemps que je n'ai plus de nouvelles d'elles. Je n'ai pas eu le temps d'exercer avant d'être comme beaucoup d'autres........... arrêté. Ce prix n'avait pas été attribué l'année dernière, la guerre interdit décidément plus de choses qu'on ne le croit. Comme ceux qui m'accompagnent, je suppose, je n'ai pas mangé ni bu depuis plus d'un jour. Au début deux hommes ou deux femmes, en fonction des cas, se relayaient pour tenir un manteau, gardien de la dignité humaine, ce manteau est depuis des heures à l'abandon, nous n'avons plus la force de tenir quoi que ce soit, pas même nos corps debout. À côté de moi il y a un couple avec leur enfant, je me force à lui faire des grimaces, il sourit de temps en temps, il doit avoir 4 ou 5 ans. Le train semble ralentir, le bruit régulier de locomotive également. Je suis apparemment le seul à y porter intérêt. Mais quand le grincement des freins se fait entendre, et qu'un léger basculement vers l'avant résonne, nous levons tous un regard vers la porte. Le train est maintenant stoppé, des voix criardes se font entendre juste derrière cette porte qui commence à coulisser. Un soldat sépare le couple de leur enfant, le père essaye de retenir son fils mais la crosse du soldat lui écrase violemment le visage. À terre, il est forcé de se relever sous les coups de pieds des autres soldats. Devant moi un chien se déchaîne sur une femme qui hurle, elle tente de frapper la bête mais la baïonnette d'un fusil lui transperce le cou. Un coup de feu retentit, et juste sur le côté un vieillard s'écroule. Nous sommes séparés des femmes ; sur un simple coup d’œil d'un soldat en blouse blanche, je me retrouve dans la colonne des vieux et des chétifs.
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Sommaire des œuvres de Patrick
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